Les Exilés
Les Exilés
(Extraits)
I
Ils étaient là
Dans leurs souvenirs
Une brassée d’herbes déjà noires
Pour tout bagage
Trop pour ce monde
Les genoux ivres de fatigue
Quand avancer n’a plus d’horizon
Retourner plus de visage
La vie n’est pas passée
Elle n’a plus cours
Que faire de cette poignée de terre
Que l’on retient
De ces mots simples jadis si clairs
Qui ne se posent plus sur la forme des corps
N’épousent plus les êtres
D’invisibles liens résiliés dans l’ombre
Les
Livrent à l’incertitude
Ils étaient apparus dans l’obscurité balbutiante
Tout habillés d’ailleurs
Sans lieu où
S’attarder au bord d’une lampe
Où s’élargirait le soir
Sur une table de toile cirée rouge avec
Le pain ouvert et l’assiette qui fume
Ils s’étaient arrêtés sans chercher à
Dégager d’espérance
Quant à l’espoir
Incertain de soi
Il attendait dans l’ombre des mots trébuchants
Trop étrangers inouïs
Des mains paumes ouvertes
Une chaise où asseoir les plus âgés
Les femmes lasses au ventre lourd
Ils résistaient debout sans entendre
Les rumeurs de l’autre rive dans ce temps maladroit
Où pour un instant
Les paupières se ferment
La chair fragile hésite
À renoncer au désir comme à la peur
Abandonner ou passer le gué
Peut-être ne plus savoir
Si l’ombre qui hante leurs pas
A déjà touché ce bord où
Leur silence n’arrivera jamais
VII
Celle qui vient
A la douceur aveugle
De la beauté
Dont ils se souviennent le soir
Dans l’ombre sans feu
Elle a ces accents rauques
Dans la voix des aïeules amoureuses
Dont le ventre confiant avait la tendresse suffisante
Elle tend deux mains
Légères comme des barques
Le soir la soie des légendes
Entre ses doigts illuminés
Passe le temps d’une bouffée
Qui circule à la ronde
Sans toucher de visage
Ajouter un commentaire