Privé de livres

           Varlam Chalamov a raconté dans un petit ouvrage intitulé Mes bibliothèques (publié aux Éditions Interférences en 1992) combien il avait été privé de livres dans les camps du Goulag, mais ce qu'il souligne de plus terrible est l'oubli des livres dont le désir a été tué : "Nous avions oublié les livres. Il n'y avait pas de place pour eux dans nos pensées, ni dans notre lexique d'une vingtaine de mots - "lever", "travail", "repas", "pic", "pelle", "escorte", "réparatiteur", "gardien", etc. Le mot "livre" nous semblait inconnu, peut-être même n'avait-il jamais existé [...]."  Ainsi s'imposent un état totalitaire et le régne de la pensée unique. Lorsque qu'un jour le prisonnier trouve par hasard un livre, il se rend compte qu'il ne sait plus lire, les mots qu'il déchiffre ne font plus sens.

          Il lui faudra attendre plusieurs années pour retrouver le goût de lire. Et alors Chalamov remarque : "Les livres me sont revenus avant les femmes - ils ont été plus forts qu'elles."

À lire aussi le billet : La Première Bibliothèque Ouvrière Municipale

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